Séance du 3 mars 1880

Séance du 3 mars 1880

[en marge, verticalement : L Breguet]

M. Fizeau communique les remarques suivantes au sujet du Baromètre anéroïde :

En vertu du principe sur lequel repose la construction du Baromètre anéroïde, cet instrument doit posséder une propriété remarquable qui n'a peut-être pas encore été signalée ; c'est d'être sensible non seulement aux variations de la pression atmosphérique, révélées par les différences de hauteur observées dans la colonne de mercure du Baromètre ordinaire, mais en outre aux variations que la Pesanteur elle-même peut éprouver dans son intensité en divers lieux, variations auxquelles le Baromètre à mercure est complètement insensible.

Cette différence de propriétés, dans les deux instruments résulte avec évidence des principes sur lesquels leur construction repose.

Dans le Baromètre à mercure, il y a équilibre lorsque la hauteur de la colonne de mercure est telle que son poids est égal à celui d'une colonne d'air de même section s'élevant jusqu'à la limite de l'atmosphère ; si la force de la pesanteur vient à varier, les poids des deux colonnes d'air et de mercure subiront des variations égales, l'équilibre ne sera pas troublé et la hauteur du mercure restera la même. Dans le Baromètre anéroïde il n'en est plus de même ; il y a équilibre lorsque la surface [mot illisible] d'une boite métallique vide d'air s'est légèrement déformée en donnant lieu à une force élastique capable de faire équilibre au poids de la colonne d'air qui s'appuie sur cette surface. Dans ce cas, si la force de la pesanteur vient à varier, le poids de la colonne d'air seul variera avec elle, tandis que la force élastique du métal n'éprouvera aucun changement. L'équilibre sera donc rompu et ne pourra se rétablir que par une déformation nouvelle de la surface métallique donnant lieu à une certaine marche de l'aiguille de l'instrument. Si donc on suppose que l'on observe simultanément la pression atmosphérique sur un Baromètre à mercure et sur un Baromètre anéroïde (ce dernier ayant été préalablement comparé au précédent et muni de tables de concordance pour les températures et les pressions) les deux instruments donneront, dans un même lieu, des indications toujours identiques entr'elles, malgré les changements de la pression et de la température dus à l'état variable de l'atmosphère.

Mais si l'on vient à transporter les deux instruments et que l'on fasse de nouvelles observations simultanées, dans un autre lieu du Globe (plus rapproché de l'Equateur, par exemple), l'intensité de la pesanteur sera moindre et l'accord [mot illisible] par cela même, pour toutes les observations faites avec les deux instruments. Dans ces circonstances le Baromètre anéroïde indiquera toujours une hauteur h' plus faible que la hauteur h du Baromètre à mercure ; remarquant d'ailleurs que la hauteur h est précisément la hauteur que devrait marquer le baromètre anéroïde si l'intensité g de la Pesanteur dans la première station n'avait pas varié en prenant, dans la seconde station, une autre valeur de g', on aura évidemment la relation :

g/g' = h/h'

H. Fizeau