Les procès-verbaux du Bureau des longitudes

Note sur la possibiltié de mesurer un arc de méridien près de l'Equateur, sur les territoires du Congo Français

Titre Note sur la possibiltié de mesurer un arc de méridien près de l'Equateur, sur les territoires du Congo Français
Créateur Rouvier, Charles (1848-1912)
Contexte Volume 1886-1890
Date 1889-02-10
Identifiant O1886_1890_205
Relation O1886_1890_204
Format 20,3 x 27,1 cm; image/jpeg;
Éditeur Bureau des longitudes; Observatoire de Paris; Laboratoire d'Histoire des Sciences et de Philosophie - Archives Henri Poincaré (UMR 7117 CNRS / Université de Lorraine);
Droits CC BY-SA 3.0 FR
Type Manuscrit; Text; Note;
Description

Note

sur la possibilité de mesurer un arc de méridien près de l'Equateur, sur les territoires du Congo Français.

(voir la carte générale du Congo Français et la carte détaillée du cours du Congo entre le Pool et Bonga.

Mission Rouvier).

Les notions que l'on possède actuellement sur la topographie du Congo Français sont encore, d'une manière générale, fort incomplètes ; d'immenses territoires restent inexplorés.

Néanmoins, les renseignements recueillis par les différents explorateurs peuvent donner d'utiles indications sur les points où devront s'exercer, de préférence, les recherches d'un terrain favorable aux travaux de géodésie que l'on se propose d'entreprendre.

Ainsi, tout le monde est d'accord pour reconnaître que la configuration du sol, dans les bassins de l'Ogowé et du Niari-Kwilu se prêterait peu à l'accomplissement de ces travaux ; il semble, au contraire, que les vastes plateaux qui s'élèvent sur la rive droite du Haut-Congo, en amont du Pool, ceux que l'on trouve près de la ligne de partage des eaux du Congo et de l'Ogowé, offriraient un terrain convenable.

C'est donc, du côté du Haut Congo que l'on devra diriger les reconnaissances qui permettront d'arrêter définitivement le choix du méridien à mesurer.

3 solutions peuvent être proposées :

1° - Choix d'un méridien sur le plateau des Batèkes [Batéké], dans le Nord et le Sud de la rivière Léfini, en passant près de Brazzaville.

Les plateaux commencent sur la rive droite du Congo dès qu'on a quitté la mission de Linzolo et s'étendent à une distance considérable, dans le Nord du Pool ; le pays est très plat, le sol sablonneux est couvert de hautes herbes serrées ; on remonte de distance en distance des bois épais d'étendue variable et des marécages difficiles et dangereux à traverser.

La contrée est peu habitée et offre par suite peu de ressources, le recrutement des porteurs n'est pas aisé.

En ce qui concerne spécialement les opérations de géodésie, le terrain se prêterait fort bien à la mesure d'une longue base, mais l'absence de vue rendrait la triangulation des plus difficiles. Il serait nécessaire de construire des signaux d'une très grande élévation, ce qui ne sera pas commode avec les moyens dont on pourra disposer. Les visées trop rasantes, ne permettraient pas d'avoir une confiance absolue dans l'exactitude des observations.

Les avantages que présenterait le choix de cette région seraient, surtout, de s'appuyer sur une station importante, de ne pas être très éloignée de la côte et d'avoir avec elle, par l'intermédiaire de Brazzaville, des communications relativement faciles et rapides.

2° Choix d'un Méridien passant par l'axe du Congo, entre les parallèles de 2° et 3°30'.S.

C'est à priori, la solution la plus séduisante, à cause des facilités que présenterait le fleuve pour se transporter d'un point à un autre. Il reste à savoir si la nature du terrain, sur les deux rives, se prêterait bien à la détermination du réseau de triangles qui doit embrasser l'axe du fleuve.

On ne pourrait se prononcer d'une manière définitive, à ce sujet, qu'après une étude minutieuse qu'il ne m'a pas été donné d'accomplir.

Voici les renseignements que je peux donner :

D'une manière générale, les rives du fleuve sont peu abordables ; elles sont souvent inondées, jusqu'au pied des collines, presque toujours marécageuses et couvertes de bois et de fourrés impénétrables. Les collines sont également d'un accès difficile, les sentiers sont rares, il faudra employer la hache pour se frayer un chemin. On ne pourra circuler qu'au prix de grandes fatigues ; dans bien des cas on sera forcé de faire des détours considérables pour atteindre les points aptes à être employés comme sommets de triangulation ; des débroussaillements seront nécessaires pour dégager la vue des signaux

Comme points d'un accès plus commode, on trouve, sur la rive droite, en partant du sud :

La station de N'Gantshu, qui pourrait être choisie avantageusement comme base d'opérations ; les hauteurs situées à l'embouchure de la Lefini et enfin la chûte des collines au point où le cours du Congo s'élargit considérablement et où commence la région des îles (parallèle de 1°37'.S.)

A partir de ce cap, le choix des stations présentera les plus sérieuses difficultés.

Les collines s'éloignent de la rive et s'enfoncent profondément dans l'intérieur, laissant à leur pied de vastes étendues de terrains plats, marécageux, boisés où la circulation ne parait guère possible. Les bords de la rivière N'Kéni sont couverts de véritables forêts de palmiers, formant des fourrés inextricables.

Près du poste des Galois, le terrain commence à s'élever très légèrement, mais il reste plat, marécageux en beaucoup d'endroits.

Sur la rive gauche, on pourrait très probablement utiliser, pour la triangulation, les collines de M'Suata, de Kwamouth, le sommet porté, sur la carte, sous le nom de Montagne remarquable, enfin les hauteurs de Bolobo.

Peut-être serait-il possible d'utiliser également quelques unes des îles, bien qu'elles soient plates, couvertes d'une végétation épaisse, et très souvent inondées.

Ainsi que je l'ai dit plus haut, N'Gantshu, est le point désigné comme centre des opérations ; on y trouvera des vivres et un emplacement convenable ; mais il ne faut pas trop compter, pour le recrutement des travailleurs, sur les indigènes de cette contrée qui se considèrent comme de trop grands seigneurs pour porter des charges.

La base pourrait être mesurée sur le plateau qui se trouve au-dessus de N'Gantshu et que l'on traverse pour aller chez Makoko et [Pountaba?].

En résumé, cette 2e solution me parait devoir présenter de sérieuses difficultés pour trouver des points convenables à la détermination d'un réseau de triangles suffisamment étendu ; elle offrirait en outre l'inconvénient d'obliger les Membres de la mission à effectuer une partie de leurs opérations sur un territoire étranger.

3° - Choix d'un méridien traversant le pays des Batékés (Alima) près de la ligne de partage des eaux du Congo et de l'Ogowé, entre l'équateur et le parallèle de 3°.S.

Des grandes ondulations de terrain, à pentes très douces, mais dont la hauteur atteint parfois jusqu'à une centaine de mètres est la caractéristique dominante de cette contrée. Une herbe rare et dure pousse sur ce sol sablonneux, dont l'aridité n'est qu'apparente et qui produit en abondance du manioc et des pistaches qui sont le fond de la nourriture des indigènes ; on trouve dans les bois qui couronnent les sommets des quantités considérables d'ananas.

La configuration du terrain reste la même sur des étendues immenses, avec des ondulations plus ou moins accentuées.

Le climat est sain, la chaleur supportable ; on peut circuler partout sans être inquiété et sans fatigue extraordinaire ; les marécages que l'on rencontre de loin en loin, peuvent être assez facilement tournés.

La population Batéké est douce, tranquille, travailleuse, nous entretenons avec elle des relations excellentes ; le recrutement des porteurs sera par suite assuré, tant qu'on ne s'éloignera pas trop de la région.

Il me semble qu'on doit trouver dans cette contrée, à proximité de la station de Diélé, sur la Haute-Alima, toutes les conditions requises pour faire de bons travaux de géodésie.

Le réseau de triangles sera facile à établir, quant à la base, on trouvera, je crois, plus d'un emplacement favorable pour la mesurer ; je pense même qu'il sera possible d'avoir une base de vérification.

Malheureusement cette contrée est très éloignée de la côte et difficile à atteindre ; la route à suivre, celle de l'Ogowé est pénible et d'une longueur désespérante ; les nombreux rapides qu'il faut traverser, ménagent toujours, ou presque toujours, au voyageur quelque incident fâcheux.

Conclusions.

La troisième solution me parait la meilleure. C'est à mon avis dans le pays des Batékés de l'Alima près de la ligne de partage des eaux de l'Ogowé et du Congo que devront s'effectuer les premières recherches ; il sera préférable de se tenir plutôt dans l'Est que dans l'Ouest de cette ligne ; on trouvera de la sorte un terrain plus favorable.

La mission partant de Libreville remonterait l'Ogowé jusqu'à Franceville, en ayant bien soin, lorsqu'elle franchira les rapides de ne laisser dans les pirogues aucun instrument ni objet précieux ; ce sera la partie la plus fatigante et la plus pénible du voyage. De Franceville, elle gagnerait Diele par terre et choisirait cette dernière station comme base de ses opérations. Si les ânes que j'ai laissés à Franceville existent encore, ils rendront aux membres de la mission d'importants services et leur éviteront bien des fatigues.

Dans le cas où contrairement à mes prévisions, elle ne trouverait pas dans cette région de terrain propice à ses travaux, la mission pourrait se diviser en 2 groupes pour continuer ses recherches du côté du Pool.

L'un des groupes descendrait l'Alima et le Congo ; l'autre prendrait la voie de terre ; le rendez-vous serait la station de Brazzaville où des résolutions définitives seraient prises.

Toulon, le 10 Février 1889.

Le capitaine de Frégate,

Ch. Rouvier

Type de document Procès-verbal
Transcripteur Muller, Julien
Collection Volume 1886-1890
Citer ce document “Note sur la possibiltié de mesurer un arc de méridien près de l'Equateur, sur les territoires du Congo Français”, 1889-02-10, Les procès-verbaux du Bureau des longitudes, consulté le 25 avril 2024, http://purl.oclc.org/net/bdl/items/show/4319

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