Bureau des Longitudes - Séance du 1er mars 1893

Bureau des Longitudes – Séance du 1^er Mars 1893.

Présidence de M. Faye.

Le procès-verbal de la dernière séance est lu et adopté.

Le Bureau reçoit les ouvrages dont les titres sont mentionnés au registre de la correspondance.

M. Cornu remet une Note relative à l'appareil de M. Bouquet de la Grye <relativement à la pesanteur> ; elle sera jointe à celle de M. Poincaré, et annexée à l'un des derniers procès-verbaux.

M. Fizeau donne quelques indications sur l'adresse de lord Kelvin (Sir W. Thomson) à la Société Royale de Londres ; il s'agit des rapports entre le magnétisme terrestre et les taches du Soleil. On ne s'était pas encore prononcé nettement pour ou contre.

Il y a 6 mois environ, M. Fizeau avait parlé d'un Mémoire de M. Ellis au sujet de la simultanéité de certains phénomènes magnétiques pour les divers points de la Terre. Lord Kelvin dit que certaines tempêtes magnétiques commencent en effet au même instant sur [barré : tous les] divers points du globe. Il reprend ensuite la théorie de la concordance de grandes variations magnétiques avec l'application de grandes taches solaires. Il rappelle que l'auteur du rapprochement des deux ordres de phénomènes est le général Sabine. Cette doctrine a eu depuis de nombreux partisans. En 1863, Lord Armstrong a rapproché une tempête magnétique remarquable d'une illumination extraordinaire de la surface du Soleil.

Lord Kelvin examine de près les conditions dans lesquelles la force magnétique venant du Soleil pourrait réagir sur nos instruments. Il observe d'abord que, d'après l'observation, la force perturbatrice mise en jeu dans une tempête magnétique est une fraction notable de la force [totale ?] dans certains cas 1/100 par exemple. En partant de là, il cherche quelle variation de force il faudrait supposer dans le Soleil, pour qu'en se transmettant à la Terre et s'affaiblissant suivant l'inverse du cube de la distance, elle produise les effets observés. Il trouve un nombre immense 10³³ de chevaux de force. Il en conclut que les tempêtes magnétiques terrestres ne sont pas dues à une action magnétique du Soleil.

M. Fizeau parle ensuite de la formule de M. Wolf de Zurich établissant une relation entre le nombre des taches du Soleil et les variations diurnes de l'aiguille aimantée. M. [Fizeau?] a toujours contesté cette relation.

M. Cornu dit qu'il n'est pas absolûment convaincu par le discours de Lord Kelvin, et que la grandeur de la variation de force qu'il faudrait supposer dans le Soleil [barré : ne prouve] n'est pas une preuve absolue, car nous n'avons pas d'idée de la grandeur des actions qui se passent sur le Soleil. D'autre part, il y a des phénomènes magnétiques dans lesquels le Soleil joue un rôle ; ainsi, l'influence de sa déclinaison sur l'aiguille aimantée est manifeste. Il est vrai que c'est sans doute un effet indirect, provenant des saisons.

M. Janssen dit qu'il faudrait voir si le travail magnétique calculé par Lord Kelvin est de l'ordre du travail calorifique lequel est énorme.

La séance est levée à 5 heures.

Le secrétaire,

F. Tisserand