Les procès-verbaux du Bureau des longitudes

Déterminations des Longitudes par Télégraphie Sans Fil (Discussions Géophysiques, 7 mai 1920) par le Professeur R.A. Sampson F.R.S Astronome Royal pour l'Ecosse

Titre Déterminations des Longitudes par Télégraphie Sans Fil (Discussions Géophysiques, 7 mai 1920) par le Professeur R.A. Sampson F.R.S Astronome Royal pour l'Ecosse
Créateur Sampson, Ralph Allen (1866-1939)
Contexte Volume 1919-1923
Date 1920-05-07
Identifiant O1919_1923_102
Relation O1919_1923_099
Format 21,2 x 31,5 cm; image/jpeg;
Éditeur Bureau des longitudes; Observatoire de Paris; Laboratoire d'Histoire des Sciences et de Philosophie - Archives Henri Poincaré (UMR 7117 CNRS / Université de Lorraine);
Droits CC BY-SA 3.0 FR
Type Dactylographié ; Text; Communication;
Description

RÉIMPRESSION DES NOTICES MENSUELLES DE LA SOCIÉTÉ

ROYALE D’ASTRONOMIE – VOL. LXXX N° 7

-

DÉTERMINATION DES LONGITUDES PAR T.S.F.

DISCUSSIONS GÉOPHYSIQUES, 7 Mai 1920

par le

Professeur R.A. Sampson F.R.S.

Traduit de l’anglais.

-

Détermination des Longitudes par Télégraphie Sans Fil

(Discussion Géophysiques, 7 mai 1920) par le Professeur

R.A. SAMPSON F.R.S. Astronome Royal pour l’ECOSSE.

-

En ouvrant cette communication, qui je crois, sera le chapitre final de l’histoire de la détermination des longitudes, on ne saurait nous refuser une brève revue de cette histoire. Nous savons qu’ARISTOTE dit que le MAROC était probablement contigu aux INDES, parce que dans ces deux pays on trouve des éléphants, et nous savons aussi que les noms des INDES Occidentales et des rapides de la CHINE montrent les idées de ceux qui les découvrent. Les données essentielles du problème n’en furent pas moins comprises par les premiers explorateurs du Globe ; seules les méthodes d’exécution leur firent défaut. Dans ses “Voyages” HARKLUYT [Hakluyt ?] rapporte la détermination d’un grand arc, je considère que c’est la première qui eut été faite avec plein succès, elle fut faite dans le Détroit de MAGELLAN en 1578 par M. John WINTER [Wynter ?] un compagnon de Sir Francis DRAKE sur un bon et nouveau vaisseau nommé “ELISABETH” de 80 tonneaux en charge”, et elle est racontée ainsi qu’il suit :

“Le 15 Septembre la lune fut éclipsée et l’obscurité commença après le coucher du soleil de six heures du soir, dans cette contrée où on était à l’équinoxe du printemps. La dite éclipse survint la 16 [effacé : ème jour] vers une heure du matin en ANGLETERRE il existait donc une différence d’environ six heures entre le lieu d’opération et l’ANGLETERRE, déterminée par une différence d’un quart de globe terrestre depuis le méridien anglais situé à l’Ouest.

Il est évident qu'il fit l'observation et le calcul de tête et nous ne pouvons pas chicaner sur le point de savoir s'il donne 90° Ouest au lieu de 70° son raisonnement étant correct dans tous ses détails.

John Winter fut capable d'effectuer sa détermination parce qu'il eut la bonne fortune d'observer un signal céleste, sous la forme d'une éclipse visible à la fois en PATAGONIE et en ANGLETERRE, mais la difficulté de trouver de tels signaux partout et au moment où on en a besoin stimula les recherches d'une façon extraordinaire, une large part de l'existence des Théories de la Lune et des satellites de JUPITER, est due à ces recherches. Lorsqu'à GREENWICH on commença à étudier dans ce but les mouvements de la lune, on conduisit cette étude bien au-delà des connaissances nécessaires aux navigateurs. Nous pouvons confirmer cette affirmation par le fait que l’Amirauté est l'éditeur des Tables de la Lune de HANSEN. Dans un autre ordre d'idées on doit à cette recherche de la détermination des Longitudes les récompenses offertes comme encouragements effectifs par l'Amirauté à l'admirable Ecole des Horlogers Britanniques qui au 18ème siècle et au début 19ème siècle a si largement contribué, par ses ouvriers, à l’évolution de la merveilleuse pièce de précision qu’est le chronomètre de Marine. On peut seulement regretter que l’étude de l’horlogerie qui n'est pas autre chose que l'étude en laboratoire de la rotation de la Terre, ait été laissée entre les mains d'ouvriers au lieu d'être considérée comme étant d'un immense intérêt scientifique, comme celle de la lune par exemple.

Ces remarques peuvent sembler hors du sujet, mais je tiens à faire voir à quiconque a le sens de l'histoire combien la question de la détermination des longitudes a été profondément liée aux progrès de nos connaissances de la Terre et aussi du ciel. Il faut reconnaître, naturellement, qu'aujourd'hui cette recherche est devenue d'un ordre scientifique abstrait. Il me souvient que lors de l'achèvement de la détermination de la dernière longitude PARIS-GREENWICH, un journaliste présentait ce travail à ses lecteurs comme étant "le réglement d'un simple point d'honneur de mathématique pure".

Nous n'avons pas besoin de demander aux purs mathématiciens d’aujourd'hui s'ils le comprennent ainsi. Nous devinons leur pensée. Bien fou serait celui qui croirait que ces recherches n'ont aucune valeur pratique. Comme l’a dit BURNS "Détournons-nous de lui et fuyons-le", nous irons de l’avant sans lui.

Au début de ces pages je déclarais que l'emploi de la T.S.F. à la détermination des longitudes serait le chapitre final de cette partie des recherches scientifiques, je voulais dire par là que ce moyen constituait une réponse idéale à la demande de recherche d'un signal commun.

Dans l’ordre de nos connaissances le calcul des longitudes a été profondément en retard sur celui des latitudes parce que pour ce dernier le ciel nous prodiguait des signes célestes, tels que le soleil, visibles à la fois en des points éloignés ce qui permettait de déterminer l’élévation du pôle. Maintenant, au moins, nous sommes en possession d’un signal mondial convenant au calcul des autres coordonnées. Nous serions vraiment insensés si nous n'employions pas sur le champ, ce moyen de valeur à toutes les recherches auxquelles il peut servir.

C’est pourquoi je propose d’examiner dans ce mémoire ce qu'un tel projet comporte : notre position actuelle par rapport à l'état de l'astronomie ; quelques indications sur la question des instruments ; une esquisse des intérêts scientifiques en jeu ; l’organisation nécessaire aux recherches ; les collaborations étrangères sur lesquelles nous pouvons compter si une étude générale est entreprise. En cela je me bornerai, à examiner, le problème de l’étude d’un grand arc seulement.

Pour dissiper toute équivoque je tiens à dire que j’aborde le sujet en astronome et que je n’ai aucune prétention à me déclarer expert en Géodésie ou en T.S.F. : je serais donc grandement reconnaissant à ceux qui plus versés que moi dans ces sciences voudront bien développer et corriger les erreurs qu’ils auront pu relever dans cette notice.

Nous avons beaucoup entendu parler récemment sur la nature du temps considéré comme une quatrième dimension et d’autres choses encore, mais pour le simple astronome le temps n’est qu’un mot pour désigner la phase de rotation du globe. Cette rotation n’est pour l’astronome que l’étalon du temps et sa montre qu’un simple instrument destiné à l’indiquer ; si nous remplaçons 0h, 2h par γ, ȣ, sur le cadran de sa pendule sidérale, le lecteur pourra dire à tout moment qu’elle est l’étoile placée sur son méridien.

Maintenant il est simple de comprendre que dans les observations stellaires et dans presque toutes les observations célestes une référence à la phase de rotation de la Terre n’entre que pour être éliminée aussitôt que possible et, en fait, c’est ce qui est fait.

Ainsi principalement par des observations longues, continues et systématiquement réunies à GREENWICH on est arrivé à connaître le système stellaire sur le cercle complet, presque aussi bien qu’on connaît la situation d’une étoile déterminée entre ses voisines immédiates.

Il semble prouvé qu’il n’y a pas, une déformation systématique de la sphère stellaire de plus de 0s02. La valeur de la montre n’a été là qu’une question secondaire. Ce résultat est vraiment merveilleux, mais il ne saurait nous contenter, il n’appartient qu’à la région stellaire.

Dans d’autres cas, comme l’étude de la lune ou celle des satellites de JUPITER qui constituent eux-mêmes une montre naturelle ou une mesure alternative du temps de la rotation de la Terre, nous sommes obligés d’utiliser les lectures de la même montre à des moments différents ou celles de montres séparées. En d’autres termes les problèmes des instruments horaires et des longitudes sont inévitables ; l’astronome ne pourra pas les traiter simplement comme des problèmes appartenant à une branche de la Géodésie, si peu qu'ils l’intéressent dans son travail fondamental il ne pourra éviter des efforts en vue de trouver des solutions aussi exactes qu'il lui sera possible.

Si GREENWICH est de nom comme de fait le premier méridien, nous ne pouvons nier que l’erreur probable attachée à la longitude PARIS GREENWICH, est beaucoup plus grande que celle attachée à la longitude PARIS WASHINGTON récemment déterminée par T.S.F.

Je voudrais maintenant jeter un bref coup d’œil sur les diverses positions actuelles et en premier lieu je veux examiner la question de la détermination du temps dans une seule station. Pour parler de la détermination du temps je tirerai mes remarques de deux sources : les travaux publiés sur le calcul de la longitude PARIS - WASHINGTON et mes propres expériences à l’observatoire d’EDINBURGH.

Il s’est écoulé plusieurs années depuis que je me suis attaché au problème de la recherche de l’heure et de la rotation de la Terre étant donné les circonstances et les moyens de mon observatoire. Une bonne partie de ces problèmes reste encore à étudier et la recherche des solutions de beaucoup d’entre eux fut interrompue par la Guerre, mais le matériel dont je dispose suffit à mes recherches.

J’ai une salle souterraine pour les horloges dont la température est réglée automatiquement, une horloge de RIEFLER et deux autres qui si elles ne sont pas toujours aussi exactes que celles de RIEFLER n'en sont pas moins capable de rendre d’appréciables services. J’ai apporté de grands soins au système chronographique. Je serais le dernier à suggérer que mes observations ont été faites plus habilement que celles faites ailleurs, mais je pense pouvoir dire avantageusement qu’on a pris des précautions instrumentales, aussi soigneusement qu’il a été possible de le faire. Je vous présente quelques figures si elles ne vous paraissent pas répondre à ce que vous espériez je me permettrai de vous dire qu'un examen approfondi vous en montrera tout l'intérêt.

La planche jointe montre l'étendue de l'erreur de l'horloge de RIEFLER pendant un an, cette erreur est généralement comprise entre ± 0s5. Ces variations limites sont dues à la pression barométrique. En corrigeant les valeurs indiquées au moyen d'un baromètre étalon pendant 20 jours ou un mois après avoir adopté la valeur de base 630 m/m par exemple et en examinant les faibles fluctuations de cette valeur s'étendant dans cette période de – 0,12 à – 0s03, admettons une incertitude de 0s,01 par jour. Ceci peut être due à un effet de l'huile employée au graissage ou à une cause liée à la répartition de la température de la chambre.

Tenant compte de cette erreur et nous souvenant qu'il y a une ou deux circonstances dans lesquelles elle varie, nous arrivons à remarquer que nous avons pour chaque observation une erreur variable résiduelle. La valeur moyenne de ces erreurs résiduelles pour l'instrument de RIEFLER est ± 0s05.

J’ai aussi pris régulièrement pendant plusieurs années les signaux horaires scientifiques ou rythmiques de la Tour EIFFEL et j’ai pu obtenir une comparaison entre mes horloges et celles de l’Observatoire de PARIS. Ces signaux constituent une espèce de vernier du temps ; avec un dispositif soigneux de battements d’horloge il est possible de fixer les coïncidences à 0s02. Récemment, je n’ai plus pris ces signaux que la nuit en même temps que je faisais la détermination du temps. La moyenne de ces comparaisons dont le nombre atteint actuellement 400 et 500, montre que EDINBURGH est en retard de 0s,06 sur PARIS, c’est-à-dire que la longitude d’EDINBURGH adoptée ; 12m44s2 Ouest est trop petite de cette valeur. Les erreurs résiduelles par rapport à cette moyenne comportent les fautes commises dans la détermination du temps aux deux observations, leur moyenne ± 0s07 qui peut s’expliquer en attribuant une erreur du signal horaire français égale à celle que j’assigne à l’horloge d’EDINBURGH, pourvu que cette erreur appartienne au système d’observation et non à la marche de l’horloge. Ce ne serait que par la comparaison des horloges qu’elle pourrait intervenir si elle était attribuée à l’horloge.

La question de la confirmation de l’origine de cette variable a une importance évidente.

Prenons par exemple une période de l’année actuelle, au 15 Janvier au 27 Février, pendant laquelle la détermination des erreurs fut très fréquente et les erreurs légèrement plus prononcées que l’est la moyenne, leurs variations furent par suite, plus faciles à noter : En comparant les résultats de l’horloge d’EDINBURGH avec PARIS et aussi avec le synchronome I, on voit que les erreurs les plus fortes sont communes aux trois observations. Il en résulte que nous pouvons attribuer une grande part de l’erreur à une quantité m qui intervient de la même manière, pour toutes les étoiles et se comporte par suite comme une erreur de l’horloge.

L'erreur de l'horloge est trouvée avec un micromètre à main et paraît être pratiquement impersonnelle.

Chaque mesure est déduite de neuf ou dix étoiles avec deux ou trois polaires et l'erreur due à chaque étoile différant de la moyenne indiquée ± 0s02 seulement est beaucoup moindre que l'erreur variable de la totalité.

La correcte détermination du temps étant la base même du travail sur les longitudes on dut naturellement se demander devant les anomalies inexplicables exposées ci-dessus si elles ne seront pas évitées par d'autres méthodes et d'autres observateurs. Prenant la détermination de WASHINGTON-PARIS comme un exemple de scrupuleuse observation des précautions par exemple l'azimuth des marques d'azimuth et le niveau furent lus entre deux observations et l'instrument renversé au milieu de chaque observation - nous pouvons dire que les anomalies ne sont pas évitées. Le nombre des observations individuelles de nuit est plus grand que les miennes, il reste des erreurs inexplicables que les Américains attribuent aux observations et non à l'horloge. Je reviendrai un peu plus loin sur les précautions à prendre.

Mais sans entrer dans des détails particuliers, il semble que si, comme je le suppose et comme les Américains le suggèrent ces erreurs sont dues non aux horloges modernes, mais aux observations, une collaboration de plusieurs observatoires dans une étude de la détermination de l'heure permettrait peut-être de les éviter.

Je voudrais faire une remarque sur la détermination du temps. Nous n’envisageons pas assez les nombreux maillons qui constituent la chaîne d'une détermination.

Etant donné par exemple la manière d’opérer à EDINBURGH et envisageant d'abord la question des étoiles, on peut envisager des erreurs de catalogue, on peut soupçonner des erreurs géométriques dans les appareils, l’envoi du signal au chronographe par l’observateur comporte une erreur personnelle, le chronographe est un appareil soigneusement construit, mais son zéro dépend de l'exact retour à sa position initiale du pointeur qui perce la bande de papier et de l'invariabilité du mouvement de l'armature de l’électro-aimant.

Passons maintenant à l'horloge. Nous considérons son pendule comme un véritable étalon. Ses indications sont transmises par une roue calée sur l'arbre de la roue à échappement et j'ai montré comment avec un microchronographe, on peut évaluer les inégalités des mouvements de ces roues.

Ce signal actionne un relai comportant un électro-aimant dont l'armature fonctionne chaque seconde.

Ce relai actionne un second pointeur soumis aux mêmes critiques. Le temps est déterminé par la coïncidence de deux trous, suivi d'un calcul basé sur l'Almanach nautique. Les erreurs de cette manière d'opérer méritent d'être examinées.

En utilisant une autre horloge au lieu du signal envoyé par l'opérateur, on peut évaluer ces erreurs. Je le fais chaque semaine par des comparaisons d'horloges en temps moyen et d'horloges sidérales toutes les heures pendant 9 heures consécutives. L’erreur est au maximum de 0s,01, résultat vraiment surprenant puisqu’une erreur d’une unité dans la détermination d’une coïncidence donnerait la moitié de cette erreur et que nous avons deux relais en fonctionnement, travaillant près de leur limite de fonctionnement.

Quand nous comparons à un signal de T.S.F., il faut faire intervenir le retard des appareils permettant d’entendre les tops de l’horloge, dans mon cas, un vibrateur actionné par un pendule réglé par le courant de la RIEFLER.

Tels sont les différents échelons qui finalement nous donnent ce que nous appelons le temps. C’est une question fondamentale que d’établir le retard dû à ces différents organes. On peut le faire, mais je crois que ce n’est possible qu’en utilisant l’oscillographe comme je l’ai montré par de nombreux exemples dans un article paru dans le Monthly Times sur la détermination du temps d’une horloge à 0,s001.

Occupons-nous maintenant de l’exactitude du R.A. système autrement dit de l’exactitude de la sphère stellaire admis.

La méthode d’emploi d’un signal de T.S.F. commun à deux stations très éloignées doit, à mon avis, être examinée.

Si les deux observateurs prennent le signal commun comme leur étalon et en même temps s’ils observent quelles sont les étoiles placées sur leur méridien, la méthode est exactement pareille à celle de l’examen d’un cercle divisé avec deux microscopes fixes. En effectuant les déplacements systématiques autour du cercle, la distance des microscopes (qui, dans notre cas, représente la différence de longitude des stations) donne les erreurs de division, c’est-à-dire que dans notre cas les erreurs systématiques dans le système stellaire R.A., seront certainement trouvées. Il se peut que cette méthode ne puisse pas remplacer les méthodes déjà en usage parce que son application réclame beaucoup trop de patience, mais il en est une autre inemployée qui offre des avantages que celle là n’a pas : elle permet d’éliminer ce qui a rapport au fonctionnement de l’horloge et ses déterminations sont cumulatives en poids. Il ne m’est heureusement pas nécessaire de parler de cette question tant au point de vue de son côté d’astronomie technique que de son côté radiotélégraphie technique. Sir Henri JACKSON, actuellement Président de l’Admiralty Radio Research Board, a été le premier à étudier les conditions de son emploi dans la Marine En outre le Général FERRIÉ, Directeur de la Télégraphie Militaire Française que j’avais informé de notre intention de discuter ce sujet, a eu l’obligeance de m’envoyer un mémoire qui sera lu. Il a fondé ses observations sur les plus récents progrès techniques, progrès qui sont grands, vraiment très grands depuis que fut déterminée en 1913 la longitude PARIS-WASHINGTON au moyen d’un détecteur à cristal, d’une longueur d'onde de 2200 mètres et d'une émission, à PARIS, de 18 kilowatts. Je puis vous montrer aujourd'hui, grâce à la complaisance du Général FERRIÉ, des bandes d’enregistreurs vraiment parfaites, prises soit à la Tour EIFFEL, soit par le Professeur H. ABRAHAM, portant sur signaux émis à diverses distances et entre autres à ARLINGTON. (MARYLAND).

Mon impression devant ces rapides évolutions est que quiconque1 a intérêt à les suivre doit s’attendre à modifier souvent ses appareils pour les maintenir conformes aux progrès car je suppose que la technique se perfectionnera de plus en plus.

Laissons cela pour nous occuper du but de nos efforts : l’emploi du signal mondial qu'est la T.S.F., un signal mondial puisque nous décidons de l’employer comme nous employons le soleil pour une moitié du monde seulement, dans le même temps. Je considère que le point essentiel du projet réside dans l’établissement d’un filet, d’une chaîne embrassant le tour du globe, constitué par un petit nombre d’arcs de grande longueur, tous déterminés avec la même précision et comportant un contrôle automatique par l’erreur de fermeture. Ce projet une fois réalisé pourra être perfectionné, mais dès le début il ne saurait manquer d'être l'étalon auquel on se référera avec plus de précision qu'à n'importe quel autre système.

Laissons cela pour regarder rapidement ce que sont les ressources présentes et le minimum nécessaire à l'exécution d’un tel plan.

On pourrait décider qu’actuellement l’émission et la réception auraient lieu pendant les heures de nuit. On pourrait supposer trois arcs moyens A B, B C, C A, aucun <n’> excédant 150°, et trois stations émettrices S.T.U. placées entre eux. L’arc A B serait étudié grâce aux émissions de S, B C grâce à celle de T et C A à celle de U. A, B, C pourraient être des observatoires convenablement équipés pour la détermination du temps et la réception des signaux radiotélégraphiques, et S, T, U pourraient être de puissantes stations radiotélégraphiques capables d’être entendues au moins sur un quart du globe terrestre. Il n’est pas indispensable que ces dernières soient pourvues d’appareils de détermination du temps de grande précision.

Si ces conditions ne pouvaient être remplies, nous admettrions des points d’observation et d’émission beaucoup plus rapprochés les uns des autres, avec les désavantages et les causes d’erreur inhérents à leur grand nombre.

Partant du méridien de GREENWICH (A), celui de CALIFORNIE (B) est 120° à l’Ouest celui de l’AUSTRALIE Occidentale est 120° Est et celui de VICTORIA (C) est 140° Est.

J’ai appris de M. COOKE, Commonwealth2 Astronomer, que les observatoires Australiens se sont unis pour l’étude de cette question et que sans aucun doute les observatoires de la Côte du Pacifique s’y intéressaient également.

En choisissant les stations radiotélégraphiques sur la carte nous pourrions désigner ANNAPOLIS (90° Ouest) comme S desservant A et B, HONOLULU (160° Ouest) comme T desservant B et C et MAURITIUS (60° E) comme U desservant C et A ; en de telles matières nous n’avons encore aucune expérience et rien ne vaut l’examen d’une carte. J’ai la bonne fortune d’avoir une très intéressante lettre de M. COOKE à ce sujet.

M. COOKE a formé un plan de liaison par T.S.F. de SYDNEY avec GREENWICH par l’Est et par l’Ouest, et il construit deux horloges capables d’envoyer des signaux qu’il enverrait à DARIEN et ADEN respectivement ; en supposant ces deux lieux pourvus de stations appropriées.

Cependant il trouve qu’avec le meilleur poste de réception que le Commonwealth3 Radio service possède il n’entend que très rarement DARIEN (100 Kws distance 8700 miles). Il reçoit d’une façon très inégale et douteuse HONOLULU (350 Kws distance 5000 miles) et il demande si les signaux sont envoyés à pleine puissance. Certainement leur émission manque souvent. Il a été prouvé qu’ADEN ne pouvait convenir actuellement ainsi que le CAIRE. D’autre part la transmission de nuit de LYON peut être lue le récepteur téléphonique sur la table. Il examine maintenant, grâce à l’amabilité du Général FERRIÉ, si les points des signaux horaires peuvent être reçus. La transmission de LYON de 9 heures ne lui parvient pas. Il entend parfaitement bien, en tous temps, CAVITE (Philippines) situé à une distance de 3600 miles.

Ces résultats capricieux dans la réception des différentes stations seront sans aucun doute désormais tirés au clair par les techniciens et probablement corrigés par eux.

Quelle que puisse être la meilleure solution, il est évident que nous ne sommes plus loin maintenant d’être capables d’établir une longitude exacte.

Il est prématuré de s’étendre davantage sur les points de détail, mais nous voudrions suggérer que nous souhaiterions voir doubler les sommets du réseau par des observatoires situés à des latitudes opposées comme : le CAP (20° E) dans la zone de GREENWICH, CORDOVA (60° O) et VALPARAISO (65° O) dans la zone du Pacifique et TOKIO (40° E) dans la zone Australienne.

On pourrait ensuite entourer le globe avec un filet d’environ six points à peu près équidistants dont les latitudes pourraient par conséquent être déterminées avec une grande exactitude.

Que coûtera un tel schéma en temps et en argent ?

Prenons d’abord les observatoires, il y a une question d’importance primordiale : leurs ressources sont, c’est une règle, ou très faible, ou d'un emploi déjà déterminé. Des correspondances que j'ai échangées avec les Membres de la Commission de l’Heure, je conclus que beaucoup craignent un programme trop étendu, un personnel onéreux, une révolution dans les méthodes routinières et des progrès insuffisants en l’Astronomie, peu en rapport avec les efforts accomplis. Mon point de vue personnel est que si une observation de la rotation de la terre est possible à faire conjointement par les observatoires du monde, ce problème qui nous intéresse ne peut pas être considéré comme étant d’ordre secondaire et que par suite il est souhaitable qu'on organise son étude à côté de celle des autres matières malgré le surcroît de travail et celui de dépenses. Mais combien accepteront un surcroît de travail et de dépenses ?

  1. Il faudrait des appareils modernes de réception à longue distance, de préférence enregistreurs.

  2. On pourrait réclamer un système de garde-temps continuellement étudié pour toutes les questions de retard et d’erreur personnelles ; mais cela doit être considéré comme faisant partie du matériel et des attributions de tout observatoire fondamental et non comme une charge nouvelle.

  3. Les réceptions actuelles devraient être faites au moins chaque fois qu’on détermine le temps et si on peut avoir confiance dans les horloges chaque jour. Les calculs sont très courts.

  4. Il faudrait avoir deux stations à recevoir. Cela prendrait 2 demi heures par jour, une à 4 heures et l’autre à 20 heures.

  5. Il est naturel que les divers observatoires préfèrent discuter leurs propres observations, mais cela n’est pas nécessaire. Il est nécessaire que tous les résultats soient envoyés au Bureau de l’Heure qui provoquerait une discussion commune.

Une question fondamentale et essentielle est que les différentes stations emploient des instruments identiques en double et d’interchanger les observateurs dans le but d’éliminer les erreurs personnelles.

Je voudrais faire quelques remarques à ce sujet :

La coutume, dans les anciens travaux sur les longitudes, a certainement été, de faire les instruments en double et d’inverser tout ce qu’on peut inverser ; cela conduisit je crois à un extrême : dans la détermination de WASHINGTON-PARIS, l’instrument est renversé dans ses Ys au milieu de l’observation du passage de chaque étoile au Zodiaque. La précaution de renverser l’instrument annule seulement l’erreur de collimation au prix de l’introduction d’une nouvelle “erreur de contact” du micromètre, mais il est évident que les avantages d’une telle méthode l’emportent sur ces désavantages ; ces derniers sont :

  1. que les instruments doivent être petits pour être portables.

  2. qu’en fait ils ne sont jamais absolument identiques, (les deux niveaux employés pour WASHINGTON-PARIS par exemple, donnèrent des différences permanentes) ;

  3. ils ne servent qu’à des usages exceptionnels, la manière dont ils se comportent et leurs défauts ne sont par conséquent pas aussi bien connus que ceux des bons instruments fixes

  4. que la détermination d’une longitude est un travail apportant beaucoup de troubles détruisant les habitudes d’un travail continu ;

  5. et qu’il en résulte des dépenses supplémentaires.

Nous notons maintenant que l'élimination de la personnalité n’est pas en fait assurée. L’intervention des observateurs américains et des instruments, WASHINGTON-PARIS et PARIS-WASHINGTON, changea le résultat de 0s,21, chaque série était bien concordante, les résultats étant :

5h17m 36s549 ±. 0051

36s758 ±. 0027

En face de cette différence la discussion n’est d’aucun secours. Naturellement la moyenne fut adoptée ; on ne put donner de meilleure conjecture sur l’origine de ces différences que celle d’une variation journalière de la valeur des deux pendules de RIEFLER variation qui ne peut être affirmée, qui n’est pas suffisante et qui j’ose le dire, n’existe pas. Mais si, en fait, nous ne pouvons atteindre le résultat que nous cherchons, je suggère que nous pourrions tenter autre chose, on pourrait ainsi organiser le travail de façon à permettre par la succession et la variété d’observateurs normaux d’approcher de la vraie erreur systématique, plutôt que d’envisager des transports d’hommes, pour de courtes expéditions, dans des circonstances non familières. Ce plan présente d’autres avantages, il permettrait d’exécuter sans troubles le travail régulier des observatoires et n’ajouterait pas à leurs dépenses. Le travail pourrait, à mon avis, être continué d’une façon permanente pendant plusieurs années. Un certain nombre de nuits pourraient être perdues, parce qu’il n’y aurait pas eu observation à l'une quelconque des deux stations. Les précautions convenables une fois connues et observées permettraient d’obtenir d’excellents résultats, les observations pourraient rapidement acquérir une valeur infinie et elles pourraient être annulées.

Les stations radios demanderaient chacune une horloge automatique pour la production des points espacés. Ces appareils seraient mis en marche à des moments approximativement connus, mais en réalité arbitraires.

Le moment de l’émission pourrait être choisi aux environs de minuit, l’émission pourrait être faite une seule fois par jour et durer 10 minutes. Aucun personnel technique spécial ne serait demandé.

Voici en résumé ce que nous pouvons espérer :

  1. une connaissance plus exacte des longitudes, solution du plus délicat problème de Géodésie.

  2. une plus exacte détermination de l’heure à travers le monde.

  3. l’élimination des petites erreurs résiduelles dans le système stellaire R.A.

  4. perfectionnements dans la connaissance des horloges comme instruments de mesure du temps et comme instruments chronographiques.

  5. des progrès dont bénéficiera la Radiotélégraphie.

Il est entendu qu’il y aura une réunion de la Commission de l’Heure en 1922, ces questions et les questions connexes pourront probablement être portées à son ordre du jour. A cet ordre du jour sont déjà inscrits plusieurs vieilles conventions internationales à retoucher par exemple, l’envoi par T.S.F. des signaux ordinaires de l’heure. Je me permettrais de suggérer qu’il faudrait que les Membres Britanniques aillent à cette réunion avec un plan préparé d’avance et digne de notre position mondiale dans toutes les questions nautiques. Nous voudrions espérer que l’Amirauté considèrera ce projet avec faveur. Une grande Compagnie privée comme la Compagnie MARCONI, pourrait certainement nous aider puissamment, si nous avons le concours de son si habile personnel, pour la documentation et la construction de l’équipement des observateurs. Ceux qui s’intéressent à la Marine Marchande sont surtout guidés par des considérations matérielles, mais nous espérons qu’ils ne voudront pas rester indifférents au succès de notre cause et qu’ils voudront bien nous aider à parvenir aux résultats cherchés. Aux astronomes incombent la pleine responsabilité du travail, nous sommes certains qu’ils auront toujours comme but la perfection de leurs systèmes horaires individuels, et qu’ils travailleront sans compter en vue du résultat à atteindre.

1 Il y a une coquille dans le texte original : « quinconque ».

2 Il y a une coquille dans le texte original : « Commonwcalth ».

3 idem.

Type de document Procès-verbal
Transcripteur Muller, Julien
Commentaires Numéroté de 2 à 18.; Pièce conditionnée à part.;
Collection Volume 1919-1923
Citer ce document “Déterminations des Longitudes par Télégraphie Sans Fil (Discussions Géophysiques, 7 mai 1920) par le Professeur R.A. Sampson F.R.S Astronome Royal pour l'Ecosse”, 1920-05-07, Les procès-verbaux du Bureau des longitudes, consulté le 20 avril 2024, http://purl.oclc.org/net/bdl/items/show/6631

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